Notre collègue nous a quittés le 2 décembre dernier. Nous, ses collègues, amis et amies qui l’avons côtoyé durant sa carrière universitaire entre 1969 et 1995 et même au-delà, tenons à lui rendre hommage.
Pionnier et bâtisseur de l’unique programme francophone en architecture de paysage de niveau universitaire sur le continent américain, Fred, comme nous le nommons affectueusement, va beaucoup nous manquer.
Sa démarche académique était imprégnée d’originalité de par sa formation et ses connaissances dans plusieurs volets. Avant d’être engagé à l’Université de Montréal, ce diplômé en horticulture, en foresterie et en architecture de paysage a travaillé dans plusieurs bureaux professionnels aux Etats-Unis avec les grands concepteurs de l’époque avec qui il a gardé contact pour en faire bénéficier les étudiants et étudiantes de plusieurs façons. D’abord, il a organisé des séminaires avec des experts auxquels participaient les plus grands. Mentionnons Dan Kiley, Masao Kinoshita du bureau Sasaki, concepteur du jardin terrasse de l’Hôtel Bonaventure Montréal. Ensuite, il a planifié des voyages outre-frontières pour étudier et visiter des projets remarquables de l’époque. Il a été l’initiateur et l’organisateur de stages d’été dans les premiers bureaux privés en architecture de paysage au Québec. Ces stages de pratique professionnelle ont souvent été à l’origine de futurs emplois pour les étudiants et étudiantes.
Il a également été un précurseur de l’application de la vision du développement durable avant la lettre. En s’appuyant sur les principes de cette approche, il s’est intéressé tout particulièrement à l’utilisation des plantes indigènes dans l’aménagement des espaces urbains et des espaces naturels. Son choix de prédilection a été l’usage des graminées considérées injustement jadis comme étant des végétaux sans intérêt. Il a mené ses recherches sur l’adaptation des végétaux sur les sites dégradés et contaminés en multipliant des expérimentations lors de divers projets. La création de son propre laboratoire que fut sa pépinière, puis la mise sur pied de sa compagnie en 1985, la firme OKA Fleurs, avec son épouse Sandra Barone, lui permirent d’acquérir une réputation au-delà des frontières du Québec.
Ses travaux de recherche appliquée dans des projets pilotes sur le rôle des végétaux en matière de stabilisation des sols et leur impact sur la qualité de l’air environnant, et ceux sur la stabilisation des berges et leur rôle dans la renaturalisation des mines abandonnées, lui ont valu d’être sollicité par de nombreux bureaux en génie biologique et en architecture de paysage. Rappelons aussi que la plus célèbre architecte paysagiste du Canada et collaboratrice fidèle de Moshe Safdie, Cornelia Oberlander, a fait appel à lui à l’occasion de l’aménagement des jardins entourant le Musée des beaux-arts du Canada à Ottawa pour l’aider dans le choix et le design avec les végétaux. Mentionnons également son travail pour la stabilisation des talus du site de l’Oratoire Saint-Joseph en 1978, celui pour la conception et l’aménagement du Jardin de LAVAL lors des Floralies de 1980 et le projet du toit-terrasse du Brookfield Place à Toronto. Quelques années plus tard, la parution de son livre intitulé Les graminées: Au jardin et dans la maison, aux éditions de l’Homme en 2004, écrit en collaboration avec son épouse, est devenu un classique pour ceux et celles qui s’intéressent au rôle des végétaux dans l’aménagement des lieux sains et durables.
De nombreux prix lui ont été attribués. Il a été intronisé au Collège des Fellows de l’Association des architectes paysagistes du Canada en 1986, il a reçu le prix Frederick-Todd pour l’excellence de sa carrière en 2003, le prix Henry Teuscher du Jardin botanique de Montréal en 2006, puis, en 2010, l’Association des architectes paysagistes du Canada lui a remis son prix le plus prestigieux pour l’ensemble de ses réalisations. Ces prix l’ont honoré en tant que chercheur, enseignant, concepteur et praticien.
A notre tour, collègues, amis et amies, nous lui rendons hommage en lui manifestant une dernière fois notre amitié, notre respect et notre profonde reconnaissance. Son objectif, lui qui aimait tant la vie, a été de faire comprendre à des générations d’architectes paysagistes l’importance de connaître et de respecter le rôle des végétaux dans l’aménagement durable des espaces urbains et naturels pour le mieux-être de la population et de l’environnement. Nous t’affirmons, cher Fred, que c’est mission accomplie!