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Stéphanie Harvey, diplômée en design de jeux, lauréate du prix de la Relève


Joueuse professionnelle de jeux vidéo, Stéphanie Harvey, diplômée en design de jeux (2009) est aussi connue sous le pseudonyme de missharvey. Son quotidien s’apparente à celui des athlètes de haut niveau, même si sa discipline se pratique en ligne. Aujourd’hui, après avoir remporté plusieurs championnats du monde, son plus grand défi n’est plus devant l’écran, mais dans la réalité où elle agit pour lutter contre la cyberintimidation. Le 28 mai prochain, elle recevra le Prix de la Relève à l’occasion du Gala des diplômés et donateurs de l’Université de Montréal.

Au moment de l’entrevue, Stéphanie Harvey était sur le point de préparer ses valises pour la Pologne, où elle était invitée comme analyste durant l’un des événements de sports électroniques le plus prestigieux d’Europe. Depuis 2016, le Comité international olympique a reconnu le sport électronique comme un sport à part entière. D’ailleurs, Stéphanie Harvey peut compter sur des collaborateurs pour l’épauler : entraînement, alimentation, sommeil, préparation mentale et physique, tout est calculé et encadré.

Syndrome de l’imposteur

Stéphanie Harvey n’avait pas de plan précis en tête en débutant le D.E.S.S. en design de jeux proposé par la Faculté de l’aménagement de l’UdeM. « Au début, j’avais le syndrome de l’imposteur, j’avais fait un baccalauréat en architecture et même si j’étais déjà joueuse professionnelle, j’avais l’impression que j’en connaissais moins sur les jeux vidéo que les autres. Il m’a fallu un certain temps pour réaliser que mon expérience était certes atypique, mais tout aussi valable que celle de mes collègues », souligne-t-elle. Les liens au sein de la cohorte sont forts et le professeur responsable, Louis Martin Guay, est très présent. Des éléments qui permettront à la jeune femme de s’épanouir et de gagner en confiance. Elle décroche ensuite un stage chez Ubisoft, pour finalement y travailler plus de 8 ans dans le développement de jeux vidéo. « Sans le D.E.S.S. et mon expérience chez Ubisoft, je ne sais pas où je serais aujourd’hui. J’ai tellement appris sur l’industrie et, surtout, sur moi durant cette période. C’est ce parcours qui m’a menée à la carrière que j’ai aujourd’hui. »

Le D.E.S.S. en design de jeux de l’UdeM est le seul programme francophone dans ce domaine au Canada. Il offre aux passionnés du jeu la possibilité de compléter leur formation universitaire avec des compétences supplémentaires et spécialisées leur permettant d’envisager une carrière dans un domaine difficilement accessible pour les autodidactes.

Rayonnement international

La jeune femme originaire de Beauport utilise depuis plusieurs années sa notoriété internationale pour sensibiliser la population aux enjeux des interactions en ligne. Elle estime que le gouvernement et les parents ont un rôle important à jouer pour prévenir les comportements déviants. « Je ne crois pas que le problème est lié aux jeux vidéo, c’est un problème de société. Au même titre qu’on donne une éducation sexuelle à nos enfants, il faut faire l’équivalent pour leur vie en ligne. »

Éduquer pour aider

Évoluant dans un milieu presque exclusivement masculin où les différences sont peu nombreuses, elle milite pour une plus grande diversité. « Je parle de la place des femmes, mais aussi de celle d’autres minorités, que ce soit lié par exemple à la couleur de la peau ou à l’orientation sexuelle. » Elle se désole de certains comportements qui se déroulent derrière l’écran : insultes, harcèlement, discrimination, pour ne nommer que ceux-ci. « Pendant longtemps, on attribuait à l’anonymat d’Internet ces interactions virtuelles qui ont des conséquences bien réelles, pourtant les gens ne cachent pas toujours leur identité sur Facebook et tiennent des propos parfois horribles ».

Convaincue que les choses peuvent changer, elle saisit toutes les tribunes qui s’offrent à elle pour parler de l’importance de contrer la cyberintimidation grâce à l’éducation. Elle donne notamment des conférences, intervient dans les médias et s’implique auprès de plusieurs causes. « Je n’ai plus la satisfaction de seulement jouer, j’ai envie de faire plus, d’aider les gens, de changer les mentalités et de sentir que je contribue à changer les choses. La cyberintimidation a des effets sur la santé mentale et l’estime de soi, il est urgent d’en prendre conscience. Toutefois, il ne faut pas non plus diaboliser les jeux vidéo, il n’est pas rare que les communautés de joueurs changent des vies positivement. »

Être à l’écoute

Elle s’engage auprès de Cybersmile, une organisation internationale qui s’attaque au harcèlement et aux abus en ligne, mais aussi auprès de la Fondation Jasmin-Roy, de Bell cause pour la cause et de Dis-Moi. « C’est important pour moi d’agir pour aider les jeunes partout dans le monde, mais aussi de faire une différence chez moi, au Québec. » Il arrive régulièrement que des jeunes se confient à elle. « J’ai cherché de l’aide pour savoir comment répondre et vers quelles ressources les diriger. » Elle collabore d’ailleurs avec Tel-Jeunes pour développer une plateforme qui permet aux jeunes de clavarder avec des professionnels. 

Reconnaissance inattendue

Fière de son passage à l’UdeM, elle y a notamment apprécié le côté avant-gardiste dans le secteur des jeux vidéo. « Le programme a été mis en place avant même que les jeux vidéo soient autant acceptés socialement. Louis Martin Guay, professeur agrégé à l’École de design, y est pour beaucoup. Mes études m’ont convaincue de ce que je voulais faire dans la vie, cela a confirmé ma passion. Presque chaque année, je reviens pour parler de mon parcours aux étudiants des nouvelles cohortes du programme. C’est important pour moi », affirme celle qui continue d’entretenir des liens avec ses anciens collègues de classe et son professeur. Elle poursuit en soulignant sa surprise, mais aussi sa fierté de recevoir le prix de la Relève : « Je ne m’y attendais pas du tout! Je vois que depuis deux ans, l’Université se rapproche davantage de ses diplômés. Je suis heureuse de voir que l’on reconnaît les parcours et les carrières atypiques. Je souhaite que cela rassure les étudiants actuels : quels que soient votre parcours scolaire, vos changements d’orientation et les doutes que cela génère, ayez confiance que cela vous ouvrira des opportunités! »

À propos du Gala

Stéphanie Harvey est la première lauréate du prix de la Relève visant à mettre en lumière un(e) diplômé(e) de 35 ans et moins qui se distingue dans son milieu et qui fait rayonner l’Université de Montréal. La distinction sera remise lors du Gala des diplômés et des donateurs, devant plus de 300 personnes. Lors de ce même évènement, le prix Jean-Coutu – Diplômé philanthrope sera remis à Gisèle Beaulieu et Michel Saucier, tandis que l’Ordre du mérite sera remis à Dre Johanne Liu, présidente internationale de Médecins sans frontières. Vous découvrirez leurs portraits dans nos deux prochaines éditions.

Ressources/conseils contre la cyberintimidation :

  • Tel-Jeunes
  • Jeunesse, J’écoute

En quelques mots…

  • Un film : Roi Lion, toujours le Roi Lion
  • Une chanson : Don't Stop Me Now - Queen
  • Un lieu : n'importe quel endroit où l'on peut entendre les vagues
  • Un prof ou un cours de l’UdeM : Louis-Martin Guay
  • Une qualité appréciée chez les autres : générosité, humilité, patience, écoute active, désir d'apprendre